• Quand la poésie fait bouger corps et cerveau

    En 1871, Rimbaud ne supporte plus les esprits, les corps et la hiérarchisation mesquine de l'espace tel qu'il peut être vécu par ces concitoyens français et notamment fonctionnaires. 

    Les poème"les assis" est particulièrement dédicacé au bibliothécaire de Charleville Mézière pour se venger de son esprit étroit et de son manque de courage pour affronter les idées et les émotions humaines en face et juste vouloir garder son confort à faire passer les ouvrages officiels à ses lecteurs. 

     

    Voir une explication de texte dans ce sens

    http://rimbaudexplique.free.fr/poemes/lesassis.html

     

    Noirs de loupes, grêlés, les yeux cerclés de bagues
    Vertes, leurs doigts boulus crispés à leurs fémurs,
    Le sinciput plaqué de hargnosités vagues
    Comme les floraisons lépreuses des vieux murs ;

    Ils ont greffé dans des amours épileptiques
    Leur fantasque ossature aux grands squelettes noirs
    De leurs chaises ; leurs pieds aux barreaux rachitiques
    S'entrelacent pour les matins et pour les soirs !

    Ces vieillards ont toujours fait tresse avec leurs sièges,
    Sentant les soleils vifs percaliser leur peau,
    Ou, les yeux à la vitre où se fanent les neiges,
    Tremblant du tremblement douloureux du crapaud.

    Et les Sièges leur ont des bontés : culottée
    De brun, la paille cède aux angles de leurs reins ;
    L'âme des vieux soleils s'allume, emmaillotée
    Dans ces tresses d'épis où fermentaient les grains.

    Et les Assis, genoux aux dents, verts pianistes,
    Les dix doigts sous leur siège aux rumeurs de tambour,
    S'écoutent clapoter des barcarolles tristes,
    Et leurs caboches vont dans des roulis d'amour.

    - Oh ! ne les faites pas lever ! C'est le naufrage...
    Ils surgissent, grondant comme des chats giflés,
    Ouvrant lentement leurs omoplates, ô rage !
    Tout leur pantalon bouffe à leurs reins boursouflés.

    Et vous les écoutez, cognant leurs têtes chauves,
    Aux murs sombres, plaquant et plaquant leurs pieds tors,
    Et leurs boutons d'habit sont des prunelles fauves
    Qui vous accrochent l'oeil du fond des corridors !

    Puis ils ont une main invisible qui tue :
    Au retour, leur regard filtre ce venin noir
    Qui charge l'oeil souffrant de la chienne battue,
    Et vous suez, pris dans un atroce entonnoir.

    Rassis, les poings noyés dans des manchettes sales,
    Ils songent à ceux-là qui les ont fait lever
    Et, de l'aurore au soir, des grappes d'amygdales
    Sous leurs mentons chétifs s'agitent à crever.

    Quand l'austère sommeil a baissé leurs visières,
    Ils rêvent sur leur bras de sièges fécondés,
    De vrais petits amours de chaises en lisière
    Par lesquelles de fiers bureaux seront bordés ;

    Des fleurs d'encre crachant des pollens en virgule
    Les bercent, le long des calices accroupis
    Tels qu'au fil des glaïeuls le vol des libellules
    - Et leur membre s'agace à des barbes d'épis.


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