• Expressionnisme

    EXERCICE 

                         Définir l'expressionnisme à partir de l'analyse d'une oeuvre artistique,

    ici musicale :

     Wozzeck, opéra d'Alban Berg, 1925

     

    Définition du genre de l'Opéra : Pièce de théâtre mise en musique pour un orchestre symphonique et des voix lyriques avec une mise en scène, des costumes et des décors adaptés. Une oeuvre d'art totale (cf Wagner)

     

    Alban Berg :  compositeur autrichien (1889-1935); Elève de Schoenberg dans la Vienne "décadente" et riche en moyens artistiques au début du XXè siècle. Comme son maître, il utilise un nouveau langage harmonique : l'atonalité, qui frotte et heurte les oreilles des auditeurs académiques par les nombreuses dissonances. Berg ne craint pas de garder une écriture musicale très expressive (en favorisant les émotions) au contraire de ses confrères viennois Schoenberg et Webern qui veulent rompre avec la bourgeoisie viennoise des opérettes.  

     

    L'opéra Wozzeck est une adaptation par le compositeur lui-même d'une pièce de théâtre étonnement moderne pour son époque (romantique), un drame de Büchner captivant.

    L'écriture est concise, sans effets superficiels, et terriblement réaliste. Woyzeck n'est pas un héros chevaleresque. C'est un simple soldat qui va tuer sa concubine Marie parce qu'elle l'a trompée avec un tambour-major. La musique atonale va amplifier la folie croissante de Wozzeck qui mène jusqu'au meurtre de Marie. 

    Structure de l'opéra très solide à partir du drame : 3 actes de 5 scènes chacun.  

    Berg va utiliser des formes de composition anciennes (références à des danses, passacailles...), des moyens romantiques comme l'utilisation des leitmotive (thème musical associé à un personnage) avec une palette sonore moderne car atonale, comme s'il salissait une palette classique tonale. 

    Thèmes expressionnistes : angoisse et folie de Wozzeck, meurtre

     

    Les gestes de la démesure ? Une piste pour analyser un extrait de Wozzeck ?

    Zoom sur l'Acte III final

    Scène 2 (invention sur la seule note si)

    Wozzeck et Marie se promènent dans les bois près d'un étang. Marie est impatiente de partir, mais Wozzeck la retient. La lune se lève, de couleur rouge sang. Cette atmosphère détermine Wozzeck dans sa jalousie et sa folie. S'il ne peut pas avoir Marie, personne ne le pourra, et il la poignarde.

    Scène 3 (invention sur un rythme)

    Les gens dansent dans une taverne. Wozzeck entre. Il voit Margret, l'invite à danser et il la tire sur ses genoux. Puis il l'insulte et lui demande de chanter une chanson. Elle chante, mais remarque du sang sur la main et le coude de Wozzeck. Tout le monde commence l'entoure et lui crie dessus. Wozzeck, obsédé par le sang, se précipite hors de la taverne et s'enfuit dans la nuit.

     

     

    Acte II 11'40-13'51 Wie der Mond rot ist ...

     

    "Comme la lune est rouge"

    de Si à Si

    Abbado dirige l'orchestre de l'Opéra de Vienne, 1990

    Marie (Soprano) : Hildegard Behrens 

    Wozzeck (Baryton Basse) : Franz Grundheber

     

    Analyse musicale :

    Eros et Thanatos dans le texte (Wozzeck embrasse Marie puis la tue) 

    La musique, tout en étant au service du texte, est d'une efficacité incroyable et dessine à la fois le décor (forêt, lune avec mouvements ascendants), l'angoisse (silences)

    et la mort (timbales) 

    Timbre : contrastes des timbres, des sonorités très douces des harpes, cordes, et celesta au martèlement sombre et régulier des timbales 

    Espace : mobilité de la note SI même si elle bouge de l'intérieur (les instruments et voix se la passent) effets de tremolos, glissandos, harmoniques...)

    L'espace devient démesuré : Extrême grave (contrebasses et trombones pour exprimer la profondeur de la forêt au début) Extrême aigu (jusqu'à la lune)

    et cluster de l'interlude (= accord dissonant)

    la palette du compositeur est atonale, nouvelle et sert parfaitement l'angoisse du personnage principal

    Temps : le temps se resserre au fur et à mesure de la scène comme si une caméra se rapprochait du couteau (silences du début puis affolement et cri)

    Dynamique : des nuances contrastées, disloquées / très subtiles / jusqu'au cri de Marie FFF / grand crescendo final sur le SI puis FFF de l'interlude 

    Caractère : angoissant, expressionniste (expression déformée) / le passage de l'interlude qui énonce la mort de Marie aux timbales puis cluster à la musique de danse de l'auberge marque un contraste éloquent

    Structure : C'est la note SI qui structure tout le morceau (instruments, voix) jusqu'à l'interlude. La note SI pour la mort de Marie

     

    • Bois : 4 flûtes (toutes jouent aussi les piccolos ), 4 hautbois (le 4e joue aussi le cor anglais ), 4 clarinettes en si bémol (1re aussi clarinette en la, 3e et 4e aussi clarinettes en mi bémol ), clarinette basse en si bémol, 3 bassons , contrebasson
    • Cuivres : 4 cors en F, 4 trompettes en F, 4 trombones (1 alto, 2 ténor, 1 basse), un tuba
    • Percussion : 4 timbales , une grosse caisse , plusieurs cymbales (une paire, suspendue, et une jointe à la grosse caisse), une grosse caisse, une caisse claire, deux tam-tams (un plus petit que l'autre), un triangle, un xylophone
    • Claviers : un célesta  (inventé en 1886) 
    • Cordes : une harpe, premiers et seconds violons , altos , violoncelles , contrebasses

     

     DeutscheOperBerlin, Trailer pour la représentation en Octobre 2018 

     

    Conclusion : pour une définition de l'Expressionnisme à partir de la scène de meurtre de Wozzeck :

    La musique propose dans cet extrait une déformation exagérée de la réalité comme si le spectateur vivait les émotions de Wozzeck à sa place. On peut dire que Wozzeck est le premier opéra expressionniste, par la musique et le sujet. Son écriture musicale est atonale et la représentation d'un simple soldat anti-héroïque en proie à ses tourments existentiels est inédit pour un livret d'opéra. L'oeuvre sera déclarée "art dégénérée" sous la période du national-socialisme, ce qui est finalement une preuve de sa qualité innovante et humaniste. 

     L’expressionnisme est un ample mouvement artistique qui apparaît au début du XXème siècle, entre 1905, année de la fondation de la communauté d’artistes « die Brücke » et 1920, année marquant la fin des agitations révolutionnaires d’après-guerre. Il s’épanouit essentiellement dans le nord de l’Europe et plus particulièrement en Allemagne. 

    Il touche de nombreux domaines artistiques aussi différents que les décors de théâtre, la danse, le cinéma, le théâtre, l’architecture, la musique même si la peinture reste son domaine de prédilection.

    Sous l'influence de la psychanalyse naissante entre autre, l'art expressionniste veut distordre et déformer la réalité pour mettre en avant les émotions, les expressions et rendre compte de ce que l'on ne fait que deviner chez l'homme; son inconscient. 

    Couleurs et forment subissent d'incroyables distorsions pour mettre en avant l'expression, l'émotion.

     

    cf dossier pédagogique :  http://www.cndp.fr/crdp-reims/fileadmin/documents/preac/spectacle_vivant_opera/dossiers_pedagogiques/CARNET_D_OPERA_WOZZECK.pdf

     

    Oeuvres proposées par les élèves :

    Expressionnisme

    Le cri, Edvard Münch, 1893

     

    Pastel et peinture à l'huile

     

    Expressionnisme

     La ville incendiée, Ludwig Meidner, 1913

     

    Expressionnisme

    Avec l'arc noir, Vassily Kandinsky, 1912

    Huile sur toile

    189X198 cm

     

    Expressionnisme

    L'art et la guerre, Otto Dix

     

    Expressionnisme

     

    La tour des chevaux bleus, Franz Marc, 1913 

     

    Expressionnisme

    Un groupe d'artistes, Ernst Ludwig Kirchner, 1925

     

    La Nuit transfigurée, Schoenberg

    direction Boulez, Orchestre Philharmonique de Radio France

    Salle Pleyel, 2009

     

    Expressionnisme

    Visions et regards, Schoenberg